Aller au contenu principal

Coulées: Propagation des débris

Au Québec, la portion la plus peuplée du territoire est située au niveau des basses terres du Saint-Laurent, dans des sols argileux généralement localisées sous les 180 m d’altitude. Durant l’holocène, ces dernières ont été recouvertes de dépôts argileux par d’anciennes mers postglaciaires, soit la mer de Champlain, la mer de Laflamme et la mer de Goldthwait. Ces sédiments argileux sont sujets à différents types de glissements de terrain, qui peuvent être superficiels, rotationnels ou fortement rétrogressifs (Gouvernement du Québec, 2017). Les glissements rétrogressifs, surviennent plus rarement, mais peuvent causer des dommages importants par leur forte rétrogression et la grande propagation de leurs débris. Dans ce contexte, le gouvernement du Québec réalise, à la demande du ministère de la Sécurité publique (MSP), la cartographie des zones exposées aux glissements de terrain. Ce projet a donc pour objectif général de développer des connaissances sur l’étude de la postrupture des débris des glissements de terrain dans les sols argileux du Québec afin d’appuyer le MSP dans le travail de cartographie des zones exposées aux glissements de terrain. 

Les glissements fortement rétrogressifs sont présents en plusieurs endroits le long des Basses-Terres du Saint-Laurent ainsi qu’en Scandinavie. En effet, le Québec et la Norvège partagent un contexte géologique très similaire et font face aux mêmes types de problématiques, dont notamment les aléas liés aux glissements de terrain de très grande envergure pouvant atteindre des superficies de plusieurs dizaines de milliers de mètres carrés. Ce projet comporte un volet de coopération entre les experts du Québec et ceux de la Norvège, particulièrement avec le Norge Geotekniske Institutt (NGI), qui vise à favoriser les échanges d’expertise et l’avancement de la recherche afin d’améliorer nos connaissances sur la mobilité des débris des glissements fortement rétrogressifs. Cette connaissance accrue pourra par la suite être appliquée à raffiner des critères de cartographie des zones potentiellement exposées aux débris de tels glissements de terrain.

L’objet de ce projet est d’étudier et de modéliser la propagation des débris de coulées argileuses. Les premières phases de ce projet (PACC 15-16-09 & PACC 17-18-03) ont permis de se concentrer, dans un premier temps, sur l’analyse des cas de coulées argileuses dont les débris se sont écoulés dans des espaces non confinés, afin de mieux comprendre la propagation des débris et de s’assurer que les modèles empiriques ou numériques, utilisés dans la pratique au Québec et en Norvège, ou ceux qui ont été développés dans l’étude antérieure à celle-ci soient utilisables. Par la suite, ces modèles empiriques ou numériques ont été raffinés en fonction, par exemple, des paramètres géotechniques ou rhéologiques des matériaux. 

Pour la présente étude, trois différents axes de recherche ont été développés :

1) caractérisation rhéologique et géotechnique des matériaux constitutifs des coulées argileuses; 

2) modélisation numérique des coulées argileuses;

3) applications cartographiques. 

La phase III du projet (CPS 21-22-21) concerne les coulées argileuses pour lesquelles la rétrogression et la propagation des débris peuvent être dangereuses pour la population. Selon leur position géomorphologique, les débris des coulées peuvent se propager de deux manières : soit qu’ils s’épandent librement dans des milieux non confinés, tel qu’au pied de falaises mortes ou sur une plage en bord de mer ou lorsqu’un cours d’eau est très large, ou bien ils s’épandent dans des milieux confinés, par exemple lorsqu’ils sont canalisés dans un ruisseau ou une rivière. De plus, pour les milieux non confinés, l’analyse des données disponibles au gouvernement indique que les débris au pied des cicatrices de coulées argileuses ont généralement atteint des distances de parcours, mesurées entre le pied du talus et le bout des débris, qui sont supérieures à celles observées pour les débris observés au pied des cicatrices d’étalements. Ce volet du projet fait suite aux projets PACC 15-16-09 (Turmel et al. 2017) et PACC 17-18-03 (Turmel et al. 2020) et propose l’analyse d’une grande coulée argileuse, comme celle survenue à Whapmagoostui-Kuujjuarapik en avril 2021, à Saint-Jean-Vianney en mai 1971 ou à Saint-Alban en avril 1894. Ces cas de coulée offrent l’opportunité d’étudier une coulée d’une très grande dimension, survenue dans des dépôts d’argiles sensibles. L’analyse d’un de ces glissements aura pour objectif d’expliquer le développement de cette coulée, soit sa rétrogression et l’étendue de la propagation des débris. L’application d’un logiciel permettant la modélisation de l’étendue des débris sera aussi testée sur cette coulée confinée qui devra être modélisée en 3D. Ce volet permettra d’améliorer les connaissances sur les propriétés des sols (géotechnique et rhéologique) et le mécanisme des coulées argileuses.

Ce travail est réalisé au sein du Laboratoire d’études sur les risques naturels de l’Université Laval en collaboration avec M. Jacques Locat, professeur émérite au Département de géologie et génie géologique de l’Université Laval, et M. Scott McDougall du Department of Earth, Ocean and Atmospheric Sciences, University of British Columbia. Un(e) étudiant(e) sera recruté(e) pour la réalisation d'un projet de maîtrise sur l'analyse de la coulée argileuse de Whapmagoostui-Kuujjuarapik.